7 - En route pour Rome (Actes 19.21 à 28.31)

Paul en est à son troisième voyage. Il est à Ephèse, et il va y rester environ trois ans. Mais il forme déjà le projet de rentrer puis de repartir pour un quatrième voyage vers Rome : Ac 19.21, Rm 1.11-13, 15.20-25. U n voyage qui se déroulera certes, mais de façon certainement différentes de ce que Paul imaginait.


Fin de séjour mouvementée à Ephèse – Ac 19.21-40

C'est en nous révélant cette pensée de Paul que Luc va expliquer comment le séjour de Paul à Ephèse se termine avec le récit de l'émeute à propos de l'Artémis des Ephésiens (Diane en Latin, déesse de la fertilité). Les artisans voyant leur gagne pain menacé, se rebellent contre « la Voie ». C'en est assez d'avoir brulé des livres, il ne faudrait pas non plus ternir la réputation d'Artémis et de son temple ! Décidément la religion est un big business !


Paul revient en Macédoine et en Grèce – Ac 20.1-6

Luc raconte en 6 versets un voyage de Paul en Grèce qui dura probablement un an. Il passe par la terre, c'est à dire la Macédoine et est certainement allé jusqu'à Corinthe. C'est pendant ce voyage qu'il écrit 2Corinthiens quelques semaines avant d'arriver chez eux en Ac 20.3. Il reste 3 mois à Corinthe pendant lesquels il écrit Romains. On est en 57/58.

Ce voyage avait un double but : « prodiguer de nombreux encouragements » (Ac 20.2) mais aussi récolter les dons des chrétiens pour la collecte en faveur de Jérusalem. C'est la deuxième collecte pour Jérusalem en moins de 10 ans.

Le « nous » revient en Ac 20.5


Paul à Troas – Ac 20.7-12

Le premier jour de la semaine, nous étions rassemblés pour rompre le pain. Ces mots sont parfois utilisés pour expliquer que traditionnellement les chrétiens se rassemblaient le dimanche. Ceci est difficile à affirmer au temps de Paul. Ce qui est certain c'est qu'on ne peut pas utiliser ce verset pour imposer le culte le dimanche plus qu'un autre jour. Car alors il faudrait aussi envisager que le culte dure jusqu'au milieu de la nuit ! S'il plaisait à l'Eglise de faire un culte le mardi, pourquoi pas. En fait cela se fit ainsi parce que Paul allait partir le lendemain (Ac 20.8). Luc raconte ce que Paul a fait à Troas, pas ce que faisait l'Eglise de manière régulière.

Eutyque (saint patron de ceux qui dorment à L'Église) tombe, meurt et est ressuscité par Paul (comme Tabitha à Joppée par Pierre Ac 9.36-42). Ce fut un immense encouragement. Dieu sait susciter du bien à partir du mal.


De Troas à Milet – Ac 20.13-16

Paul veut arriver à Jérusalem avant la pentecôte qui est dans environ 40 jours (décompte à partir d'Ac 20.6).

Milet était une ville côtière située à environ 50 km d'Ephèse. Les anciens firent la distance qui représentait un bon voyage pour l'époque.


Discours aux anciens d'Ephèse – Ac 20.17-38

Ce discours sonne comme un discours d'Adieu v25 et 38. Pourtant il est probable que Paul soit revenu à Ephèse après avoir été libéré à Rome (ce que les Actes ne racontent pas). Ce discours aurait pu s'intituler « comment servir l'Eglise ». Il est très utile pour des disciples de Jésus de le méditer. Voici quelques points importants :
- v19 Paul explique qu'il a servi le Seigneur comme un esclave
- v19 dans les larmes au milieu des épreuves (= persécution des juifs)
- v20 il a enseigné tout ce qui était utile ; v27 il a annoncé tout ce que Dieu a décidé
- v28-30 Paul n'est pas dupe il connaît la nature humaine : nous devons la connaître aussi sans être naïf !
- v35 venir en aide au faibles, d'abord dans l'église (Gal 6.10) !
- v35 il y a plus de bonheur à donner qu'à recevoir

A travers ce discours on a aussi une notion de ce que doivent être les anciens (presbyteros au v17).


Voyage vers Jérusalem – Ac 21.1-17

Les choses s'accélèrent : Paul à Tyr reste 7 jours, puis à Césarée chez Philippe l'Évangéliste helléniste.

Agabus, toujours le même(Ac 11.28), annonce la captivité de Paul.


Paul et Jacques – Ac 21.18-26

Paul est reçu chez Jacques : Paul a eu du succès chez les non juifs (v19), Jacques a eu du succès chez les juifs (v20).


Ac 21.21 Paul est accusé faussement (on leur a fait croire...) de pousser les juifs à abandonner leurs « coutumes » (mot issu du Deutéronome). La prédication de Paul qui n'oblige pas les gentils à se faire circoncire (1Corinthiens 7.18-20 par exemple) est interprétée comme étant l'inverse : il obligerait les non-juifs à abandonner la circoncision ! (comme certains juifs de la diaspora qui se faisaient recoudre un prépuce pour pouvoir participer aux jeux romains ou aux orgies !).


Pourtant les efforts de Paul pour faire accepter ses églises païennes dans la koïnonia sont formidables :

d'abord il accepte de payer pour le vœu de Naziréat des 4 juifs qui se purifient et pour le sien. Or ce vœu consiste en l'abstention de viande et de vin pendant 40 jours, pendant lesquels, les cheveux et la barbe ne devaient pas être coupée. Les 2 derniers jours se passaient entièrement dans le temple. A la fin, des sacrifices devaient être offerts : Un agneau d'un an pour les péchés, un bélier pour la paix, un panier rempli de pain sans levain, des gâteaux faits de farine fine et d'huile, du vin. Finalement le dernier jour, les cheveux et la barbes devaient être rasés et brulés sur l'autel en même temps que le sacrifice. Ce sont d'énormes dépenses que Paul doit engager.
Ensuite il apporte pour Jérusalem la collecte qu'il a organisée depuis plusieurs mois (voire années).


D'un point de vue herméneutique (pour nous aujourd'hui), il ne faut pas s'étonner de la difficulté de construire une église faites de gens de milieux, de culture, d'opinions, d'éducation, voire d'origine religieuses différentes. Si dans les Actes on sent que l'unité de l'église est en danger permanent, l'enseignement de Jésus reste clair : Matthieu 5.46 ...si vous aimez ceux qui vous aiment, quelle récompense aurez–vous ? Les péagers aussi n’en font–ils pas autant ? S'il est normal que ce soit difficile pour nous aussi, l'Église ne doit pourtant pas être un club de gens du même milieu qui se réunit pour une bonne cause. Non, c'est une famille avec les tensions que cela peut occasionner. Paul était prêt à donner sa vie pour l'unité de l'Eglise. Et nous ? Si nous pensons construire une église en faisant moins d'efforts que nos frères et sœurs du premier siècle, nous risquons fort d'être déçus.

Mais la rumeur a déjà fait son travail de sape. Cette accusation vient de « on leur a fait croire ». La rumeur est destructrice. Nous ne devons ni en créer, ni les croire aveuglément. Ce qui ne veut pas dire qu'il faut les enterrer sous le tapis ; il faut en discuter, mais le bénéfice du doute doit être la règle entre chrétiens !


Comme nous l'avons déjà évoqué, en Ac 21.25 Paul  semble apprendre les conditions pour la communion fraternelle entre Juifs et gentils.


Le nous s'arrête et ne reprendra qu'en Ac 27.1


Paul arrêté dans le temple – Ac 21.27-22.29

Le projet bien intentionné de faire démontrer à Paul sa loyauté envers le judaïsme échoue à cause de juifs d'Asie (de la région d'Ephèse avec son Artémis ?) qui l'accusent (encore faussement, Matthieu 5.11) d'avoir introduit des gentils dans l'enceinte du lieu Saint. Ces juifs savent quel succès a l'Évangile en Asie (Ephèse, Smyrne, Pergame : Ac 19.26). Ils trouvent alors un prétexte pour accuser Paul.

Paul est sauvé par un tribun dont le seul soucis est de faire régner l'ordre. Paul plaide (tout chevelu et barbu) devant le peuple pour sa défense, et dans son élan fini par prêcher :
-
Comme Pierre à la pentecôte (Ac 2.14), Paul prêche devant le peuple de Jérusalem.
-
Comme Pierre (Ac 2.32) il prêche une expérience personnelle indéniable (Ac 22.6-21)

Nous aussi nous devons raconter nos expériences personnelles de conversion et de vie chrétienne. Cela risque de ne pas plaire ou d'être mal compris, mais nous devons être les témoins de la réalité de l'action de Dieu dans notre vie. Ac 22.14-16 raconte la conversion de Paul mais est aussi un résumé de la vie chrétienne


La citoyenneté romaine de Paul le sauve.


Paul devant le Sanhédrin – Ac 22.30-23.10

Paul est frappé sur la bouche : ça fait mal et c'est humiliant. Le but d'Ananias est de montrer à Paul que ce qui sort de sa bouche n'a pas de valeur.

Paul ne dit pas qu'il ne savait pas que l'homme devant lui était Ananias (il le reconnaît comme juge). Il dit (ironiquement) qu'il ne savait pas qu'un homme comme Ananias pouvait être Grand Prêtre !

Habilement il provoque une division dans le Sanhedrin au sujet de la résurrection. Les pharisiens soutiennent Paul (Ac 23.6-9) comme ils ont soutenus (à travers Gamaliel) Pierre.


Le tribun sauve encore Paul du lynchage.


Jésus apparaît devant Paul – Ac 23.11

Le Seigneur confirme à Paul qu'il devra bien aller de Jérusalem à Rome. Paul est spirituel : quand ça ne va pas, il sait se laisser encourager par Dieu (à Corinthe Ac 18.10, ici....)


Paul transféré à Césarée – Ac 23.12-35

Suite à un complot démasqué par le neveu de Paul, il est transféré à Césarée (quartier général des troupes romaines en Palestine) devant le préfet romain Félix qui fut procurateur en Palestine de 52 à 60.

Félix fut le premier esclave dans l'histoire romaine à devenir gouverneur d'une province, grâce à son frère Pallas qui fut l'amant (homosexuellement) de Néron. Félix contrairement à son frère aimait les femmes (dans le mauvais sens du terme). Il en eut trois.


Paul comparaît devant Félix pendant 2 ans – Ac 24.1-27

Le grand prêtre et les anciens présentent à Félix une liste d'accusations contre Paul (Ac 24.5-6) qui ressemble à celle présentée par le Sanhédrin contre Jésus (Lc 23.1-2). Paul se défend en montrant que sa foi n'est pas stupide, et ne contredit pas les écritures. Il explique qu'il est venu faire des actes de compassion en faveur de ma nation (v17) :c'est à dire apporter de l'argent (Rm 15.25-28). Félix, qui est procurateur depuis 5 ou 6 ans déjà en Palestine, cerne bien la question. Il a compris que Paul dispose d'une certaine somme d'argent (collecte) et de larges soutiens un peu partout. Il espère que Paul le soudoierait pour pouvoir être libéré. Flavius Josephe confirme sa vénalité.

Cependant la loi romaine stipulait qu'un citoyen romain ne pouvait pas rester en détention provisoire plus de 2 ans avant de passer en jugement. Félix a fait qq chose d'illégal à Césarée (Ac 24.27). Pour de l'argent (Ac 24.26).


Paul en appelle à César – Ac 25.1-12

En 62 Félix réprima dans le sang une émeute qui eut lieu à Césarée ; de nombreux juifs furent massacrés. Les autorités juives se plaignirent à l'empereur, ce qui provoqua son rappel par les autorités de Rome. Félix est remplacé par Festus.

Luc ne le raconte pas, mais on sait qu'en 62, entre le départ de Félix et l'arrivée de Festus, Jacques (le frère du Seigneur) est lapidé à Jérusalem. Jacques lapidé, Paul en prison, le christianisme est en mauvaise posture.

 

A peine arrivé, Festus monte à Jérusalem, certainement pour rencontrer les autorités locales. Parmi d'autres sujets « brulants » les grands prêtres réitèrent leur plainte contre Paul. Et ils préparent un guet-apens en profitant de l'inexpérience de Festus dans la région d'autant que Festus prend au sérieux la nécessité de juger Paul qui est citoyen romain et qui attend depuis deux ans d'être jugé. En Ac 25.9 la situation semble ramener Paul à Jérusalem ce qui n'est pas ce que le Seigneur a prévu (Ac 23.11). Paul en appelle à César, car retourner à Jérusalem, c'est la mort assurée1.


Paul devant Agrippa et Bérénice – Ac 25.13-26.32

Festus, contrairement à Félix, n'est pas très au fait des pratiques juives. Il demande conseil à Agrippa II (descendant d'Hérode). Pour la troisième fois la conversion nous est racontée.


Ac 26.8 est un verset intéressant, même pour nous ! En effet la résurrection est souvent un problème pour la foi : v26.23-29 les auditeurs aimeraient y croire. Mais ils s'y refusent !


Tout comme Jésus fut considéré innocent par Hérode, Paul est considéré innocent par Agrippa II.

Finalement Paul est passé devant les trois mêmes instance de jugement que Jésus.


Départ pour l'Italie, tempête et naufrage – Ac 27.1-28.10

Le nous revient.

 

L'épisode de la tempête montre Paul capable de prendre le contrôle de la situation. Il a pas mal navigué mine de rien dans ses trois premiers voyages. Il a même fait naufrage plusieurs fois (2Cor 11.25).


L'épisode du serpent (Ac 28.2-6) montre que Dieu prend soin de Paul jusqu'à ce que sa mission soit accomplie (cf Lc 10.19 Voici: je vous ai donné le pouvoir de marcher sur les serpents et les scorpions et sur toute la puissance de l'ennemi, et rien ne pourra vous nuire).


Paul réalise des guérisons à Malte : il n'oublie pas les autres même dans la difficulté ! (Ac 28.7-10). Comme pour Jésus en Lc 5.15, les gens viennent voir Paul pour être guéris de leurs maladies (cf aussi Ac19.11-12).


Finalement, Paul débarque à Pouzzoles le port de Naples où il y a des frères ! Et ils ont réussi à les trouver ! Le réseau chrétien existe déjà !


Rome – Ac 28.14b-31 : C'est ainsi que nous sommes arrivés à Rome
On est fin 62 ou début 63. Il y a des chrétiens à Rome déjà depuis longtemps. Les frères de Pouzzoles ont du avertir ceux de Rome que Paul arrivait. Ils envoient un comité d'accueil sur la route ! Ils se rencontrent à Appius à 65 km de Rome. Le mot venus à notre rencontre en grec est le mot utilisé à l'époque pour une députation d'une ville allant accueillir un général ou un roi.


Paul est arrivé aux extrémité de la terre (Ac 1.8)


Il n'oublie pas de prêcher aux juifs, mais le message de Luc ici est celui du v 28 (il faut se rappeler que Luc écrit après la chute du temple en 70) les juifs n'ont cessé de mettre des obstacles à la foi en Jésus ; les païens eux, ils écouteront ! C'est à la fois un fait (Luc l'a raconté depuis Ac 10) et une prophétie.


La fin abrupte du livre des Actes

Le livre des Actes est le volume II de Luc c'est explicite dans la formule d'introduction de Actes 1.1. Par contre la fin du livre est abrupte : Luc ne raconte pas ce qui se passe ensuite : pourquoi ?

  1. tome III planifié mais interrompu ou perdu (le canon de Muratori2 vers 170, fait référence à un récit (perdu) du départ de Rome vers l'Espagne)

  2. mais Luc-Actes font un seul récit bien structuré, Luc souhaitait peut-être s'arrêter là : après tout, Paul et l'Evangile avec lui sont arrivés de Jérusalem à Rome, des juifs aux païens.

  3. Peut-être que Luc ne parvenait pas à savoir ce qui s'est vraiment passé pour Paul ensuite.


Alors que se passe-t-il à Rome ? Ac 28.30 dit que Paul résida deux ans dans la même maison, assigné à résidence donc au moins jusqu'en 64. Or, nous l'avons vu, la loi romaine stipulait qu'un citoyen romain ne pouvait pas rester en détention provisoire plus de 2 ans avant de passer en jugement. Donc :

  1. Soit Paul est jugé et condamné à mort. La version occidentale d'Ac 28.19 semble évoquer la mort de Paul à la suite s son procès (voir NBS édition d'Étude, note d'Ac 28.19).

  2. Soit il est libéré (César n'accordant pas assez d'importance à ce prisonnier).

Cette deuxième hypothèse semble probable pour différentes raisons :
- Paul reste deux ans en prison, ce qui est la limite de temps légale
- Il voulait aller en Espagne (Rm 15.20-24) ou il n'y a pas de Diaspora Juive (Rm 15.20)

- Clément de Rome (95) semble dire dans l'épître3 qu'on a conservé de lui, qu'il a essayé de le faire en disant que Paul a atteint les bornes de l'occident4 qui pour un romain comme Clément, ne peuvent être que la limite occidentale de l'Empire Romain.
- les épîtres pastorales (1&2 Timothée, Tite) semblent expliquer que Paul a continué son ministère, mais pas en Espagne. Par exemple en Tite 3.12, Paul demande à Tite de le rejoindre à Nicopolis (ville grecque sur le bord de l'Adriatique). Les salutations de 2Timothée 4 semblent montrer que Paul n'est pas en Espagne mais plutôt en Macédoine ou à Rome.

- L'Historien Eusèbe de Césarée (313) rapporte le témoignage de Tertullien (écrivain et théologien chrétien, père de l'Eglise) qui situe la mort de Paul dans le contexte de la persécution de Néron : « On raconte que sous son règne, Paul eut la tête coupée5 à Rome même... ».


On reconstruit cette portion d'histoire de la manière suivante6 :
- Paul arrive en 62 à Rome, il est libéré en 64 et commence ce que les historiens appellent « la deuxième carrière ». Mais celle-ci fut certainement de courte durée 1 à 2 ans maximum
. Entre 62 et 64 il écrit Ephésiens, Philippiens, Colossiens, Philemon. Puis pendant sa deuxième carrière il écrit 1Timothée et Tite

- à la suite de l'incendie de Rome (juillet 64), les chrétiens, selon Tacite, furent accusés pour que Néron soit disculpé (printemps 65). Alors, se déroulèrent les scènes horribles décrites dans les Annales XI. Il est vraisemblable que Pierre fut crucifié dans ce contexte.
- En revanche la décapitation de Paul implique un procès régulier (pendant lequel il écrit 2Timothée), qui se serait déroulé un peu plus tard, mais avant le suicide de Néron le 9 juin 68. On peut avancer la date de 67.


Conclusion 1 : Les Actes sont ils une histoire de l'église primitive ?

Les Actes couvrent une période d'environ 33 ou 34 ans : de 30 (année du kérygme) à maximum 64 (après les 2 ans de Paul à Rome). C'est le livre du « mouvement » :
- De Jérusalem à Rome
- De l'Ancienne Alliance à la Nouvelle Alliance.
- Des Juifs vers les païens
- Jusqu'aux extrémités de la terre

On ne peut considérer les Actes comme l'histoire historique de l'Eglise dans le sens du mot aujourd'hui.  Par contre c'est l'histoire spirituelle de l'Eglsie que Luc nous livre.C'est à dire l'hsitoire de l'Action de l'Esprit Saint.
Du point de vue historique
7 c'est un livre déséquilibré et partiel : il ne raconte pas l'histoire de toute l'Eglise :

- Il ne raconte que l'expansion de l'église de Jérusalem vers Rome ; il ne s'intéresse pas à son expansion vers la Mésopotamie, ou l'Egypte et l'Afrique du Nord. Il ne parle pas de certains lieux évangélisés, que l'on retrouve dans les épîtres (Illyrie Rm 15.19 ; Pont, Cappadoce, Bithynie 1Pi 1.1 ; Crète Tt 1.5...)

Il ne raconte pas ce qu'ont fait tous les apôtres ; on appelle ce livre « Actes des apôtres ». On devrait l'appeler « Actes de Pierre et Paul ». On y parle un peu de Jean et de Jacques (Ac 12), et pas du tout des autres apôtres.

- Il s'intéresse peu à la biographie des apôtres dont il raconte les actes : Pierre disparaît du récit quand il passe la main à Paul pour la conversion des Gentils, on ne sait pas ce qu'il devient. Même la vie de Paul, n'est vue que partiellement : Luc ne s'intéresse à lui qu'en terme de mission auprès des gentils, peu en terme de personnalité, même si ses « actes » par déduction en parlent.

- Il n'a pas pour but de décrire l'organisation de l'Église. Il mentionne des rôles (anciens, prophètes, docteurs, apôtres), mais il ne les explique pas. On ne sait pas comment s'est organisé l'Église de Jérusalem après le départ des 7 (qu'on appelle souvent diacres, mais que Luc n'a jamais appelé ainsi), ni comment on est passé du leadership des apôtres au leadership de Jacques frère de Jésus (12.17 ; 15.13 ; 21.18). Bien sûr par déduction on pourra en tirer pas mal de renseignements sur les rôles dans l'Église, mais ce n'est clairement pas le but de Luc de donner un modèle d'organisation de l'Église.
- Luc s'intéresse énormément au phénomène de conversion.
Il décrit des conversions de masses et des conversions individuelles. Mais ce sont des narrations. Luc ne cherche pas à enseigner comment se convertir car pour lui, le(s) lecteur(s) sait déjà, comment on se converti. Cependant, ce qu'il raconte, corrélé aux épîtres de Paul et Pierre, nous permet d'avoir une idée précise sur la manière de devenir chrétien.

On le comprend : Luc ne voulait pas écrire un livre d'histoire de l'Église.


Conclusion 2 : Etre spirituel c'est mettre en pratique

« Lorsqu’on dit des Actes des Apôtres qu’il sont un complément de l’évangile de Luc, on ne leur rend pas justice : la question se pose alors de savoir leur raison d’être, pourquoi Luc a jugé non seulement utile, mais nécessaire de les ajouter à l’évangile alors que les autres évangélistes ne proposent rien de tel ? La vérité est donc que les Actes entretiennent un rapport plus profond, plus essentiel, avec l’évangile : celui-ci représente une promesse dont les Actes sont l’accomplissement. Vous me direz alors sans doute : mais si les Actes sont l’accomplissement, alors ils suffisent, quel rôle jouons-nous donc nous-mêmes aujourd’hui ? Il faut qu’il soit clair que nous continuons aujourd’hui encore d’écrire les Actes. Certains commentateurs ont fait observé que, si la finale des Actes, dans laquelle on découvre Paul « proclamant le Royaume de Dieu et enseignant ce qui concerne le Seigneur Jésus-Christ » (28,31), n’était pas vraiment une finale, c’est que la finale resterait éternellement à écrire. Autrement dit, les Actes définissent un objectif, des moyens, et en montrent une première mise en œuvre : c’est en cela qu’ils constituent un accomplissement. L’objectif, je viens de le rappeler, est d’enseigner ce qui concerne le Seigneur Jésus-Christ, en particulier en proclamant, comme Jésus l’avait fait d’ailleurs lui-même, le Royaume de Dieu. »8


Face à la description de ce « mouvement », nous devons adopter deux attitudes :

1/ être ouvert, ne pas s'accrocher à des schémas (traditions), être prêt à se remettre en question

2/ être soumis en lisant les actes avec la volonté d'obéir à l'Esprit de Dieu. Si le but n'est pas d'imiter un modèle de structure, le but est bien d'imiter l'Esprit de cette église du premier siècle dont Luc nous parle tout au long des Actes et qui n'est autre que l'Esprit Saint : Ac 5.29 Pierre répondit ainsi que les apôtres: Il faut obéir à Dieu plutôt qu'aux hommes. [...] 32 Nous sommes témoins de ces choses, de même que le Saint-Esprit que Dieu a donné à ceux qui lui obéissent.


Il ne s'agit pas de restaurer l'Eglise du premier siècle, mais son état d'Esprit : un état d'Esprit Saint, un esprit d'obéissance.


 

 


Notes

 

1 Ce n'est pas la peine de chercher la souffrance et la persécution ou la mort glorieuse. Cela arrivera tout seul ! Au deuxième siècle, il y avait une tendance dans l'Eglise à rechercher le martyr pour la gloire.

2 Le fragment de muratori est un manuscrit en latin du VIIe siècle qui recopie un document grec de 170 ap JC environ. C'est une discussion sur les livres utilisés et acceptés par les églises que l'auteur (inconnu) fréquente. La liste de ces livres correspond à notre nouveau testament plus quelques ouvrages qui seront rejetés plus tard.
Il est appelé du nom de l'historien italien qui l'a découvert à Milan aux alentours de 1740.

3 C'est le texte le plus ancien qui parle directement de la mort de Paul à Rome : « après avoir enseigné la justice au monde entier jusqu'aux bornes du couchant, il a rendu son témoignage devant les autorités et c'est ainsi qu'il a quitté ce monde pour gagner le lieu saint, demeurant pour nous un modèle de patience » 1 Clément aux Corinthiens 5.7

4 Paul en Gal 1.15 se compare au serviteur de Yahvé d'Es 49 en citant cette écriture. Or en Es 49.6 Dieu dit à ce serviteur « J'ai fait de toi la lumière des nations pour que mon salut parvienne jusqu'aux extrémités de la terre ».

5 C'était ainsi que les citoyens romains condamnés à mort étaient exécutes.

6 Michel Trimaille, « Que sait on de Paul aujourd'hui ? », dans « Aux origines du christianisme », Ed Gallimad, 2000.

7 Le mot historique a deux sens possibles : a) qui raconte quelque chose qui s'est réellement passé b) qui explique les évènements du passé d'une manière scientifique et impartiale

8 Hervé Ponsot, « Paulissimo », domuni – université dominicaine sur internet

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